vendredi 5 mars 2010

Islam en Belgique: la nouvelle extrême droite? (Eric Bruckmann)

vendredi 22 janvier 2010, par Eric Bruckmann

Le thème du port du voile revient comme un boomerang au gré de l’actualité. Un point commun entre le voile et le boomerang ? Ils se laissent porter par le vent. Puis vous reviennent dans la figure si vous vous laissez distraire.



Le 18 janvier dernier, le MR mettait en débat la question du port du voile dans la sphère publique. Les trois brillants orateurs étaient confrontés à une foule nombreuse constituée d’au moins la moitié de musulmans et musulmanes qui, croyait-on, étaient venus écouter pour poser à leur tour des questions. Erreur. Les personnes insurgées ne comprennent pas qu’on ne veuille pas de signes religieux dans les institutions publiques ou, plus largement, dans la sphère publique. C’est quand-même pas compliqué à comprendre qu’on peut porter un voile ou une croix d’un côté d’un guichet mais pas de l’autre ! Ben si…

L’objet de ce billet n’est pas de rapporter ce qu’il s’y est dit ou le comportement des uns et des autres. J’ai assisté à trois brillants exposés d’une humanité et d’une tolérance indéniable ainsi qu’à une manipulation malsaine : celle d’une sorte d’apprenti imam qui a crié haut et fort que la charia devait être la loi au-dessus de tout, accompagné de sbires disposés dans toute la salle, comme il se faisait du temps des jeunesses hitlériennes pour voir qui était un mauvais ou un bon… aryen…

Feindre et geindre comme devise

A chaque réponse polie (à outrance) face aux accusations de quelques musulmans, les orateurs ont toujours été qualifiés « d’anti-islam », comme Karima (« Insoumise et Dévoilée", éd. Luc Pire), accusée de faire un amalgame entre son histoire et l’islam. Comme si l’un et l’autre n’étaient pas liés. Même lorsque la salle a dû être libérée, des jeunes ont crié qu’on arrêtait le « débat » parce qu’on ne voulait pas que les musulmans s’expriment… toujours faire semblant de ne pas comprendre et ainsi toujours se présenter en martyr que personne n’aime.

L’apprenti imam a été un exemple de manipulation manifeste.

Lors du chaos qui a régné au début de la séance, lorsque une trentaine de filles voilées ont quitté les lieux, il s’est levé pour appeler tous les musulmans au calme : « je m’adresse aux musulmans : chacun d’entre vous aura l’occasion de parler après », dit-il. Les autres, on s’en fout.

Après les orateurs, il prit la parole et s’embarqua dans une démonstration sensée devoir prouver que les filles voilées le sont parce qu’elles le veulent, ce qui ne plut pas à l’animatrice du débat et, lorsqu’elle le remit à sa place dans un souci de discipline, il lança « nous étions d’accord, Madame ! Après eux, nous devions pouvoir nous exprimer ! Et je le redis : la charia est supérieure à toutes les lois et vous ne pouvez pas nous interdire le voile ! ». Voilà. Le débat organisé par le MR, aux yeux des fidèles, l’était donc en collaboration avec lui, l’autorité religieuse et tout empêchement de le laisser mener les opérations est donc désormais une trahison des infidèles envers les musulmans. Ca se gâte. La foi est supérieure à la liberté. Le message est passé, on se croirait il y a 500 ans…

Alors, Nadia Geerts, collaboratrice du site d’observation de l’extrême droite ResistanceS.be prend la parole d’une voix douce et posée et lui explique « Laissez-moi parler. Vous avez votre opinion sur moi et si après, je n’arrive pas à vous faire changer d’avis, vous pourrez rentrer chez vous avec votre opinion, calmement… ». Le gars la coupe et lui lance « nous sommes chez nous ici et jamais nous ne rentrerons nulle part !!! Personne ne nous fera partir !!!». Patatras. Voilà la collaboratrice d’une association luttant contre l’extrême droite qui est raciste, islamophobe et insultante pour les musulmans. Chez lui, pour lui, ce n’est donc pas sa maison. Il est en conquête.

Ce cirque doit arrêter.

Ce qui s’est passé ce soir là est éloquent à plus d’un titre. D’abord parce que le fait simplement de parler de l’islam est insultant pour certains musulmans, ensuite parce que le débat a été détourné pour qu’un apprenti imam montre aux jeunes qu’il est le leader, leur seul défenseur. Un héros.

Entre tolérance et fermeté

Il est vraiment urgent dans ce pays que nos élus prennent conscience que la tolérance de toutes les religions est la base d’un état démocratique mais que la fermeté envers tout groupe d’individus, fut-ce-t-il religieux, qui prône la haine et la discrimination sexuelle, raciale ou religieuse est aussi une évidence. C’est une question de respect pour tous ceux qui sont morts pour défendre la liberté des citoyens, tous ceux qui se sont battus pour que l’Etat et l’Eglise soient séparés.

Bien sûr, l’enjeu n’est pas de réduire la liberté individuelle ou la liberté de culte mais bien de la renforcer : que les filles se voilent en rue, que des personnes montrent leur appartenance à l’islam n’est pas dérangeant. Il s’agit bien sûr de la sphère publique qui doit rester neutre. Un état laïc n’est pas un état contre les religions mais un état qui protège tous les citoyens, quelles que soient leurs convictions.

Il est inacceptable que des croyants de quelles que religions que ça soit soutiennent que les lois de leurs livres soient supérieures aux lois de notre Pays. Toute personne qui encense l’application de la charia n’a rien à faire en Belgique, même s’il est belge ! Pas plus que les nazis n’auront leur place ici.

Alors oui, il y a des nazis catholiques. Ce n’est pas pour ça que tous les cathos sont des nazis. Non, tous les musulmans ne sont pas islamistes, mêmes si tous les islamistes sont musulmans… il serait aussi idiot de dire qu’on ne peut faire preuve de fermeté envers la religion islamique sous prétexte que tous les musulmans ne sont pas extrémistes au même titre qu’il serait stupide de dire qu’il faut être indulgents envers les catholiques parce qu’ils ne sont pas tous racistes.

Non, nos ancêtres ne se sont pas battus pour en arriver à se retrouver 500 ans plus tôt. Je ne veux plus de guerre de religions ici en Europe. Car, si je ne serai jamais prêt à prendre les armes pour des raisons de querelles linguistiques, je le serai toujours pour défendre ma liberté et celle de mes enfants contre un Dieu qui n’existe pas pour moi.

Les musulmans sont toujours les seuls à se plaindre. Personne ne les aime, l’Etat est toujours contre eux, la population aussi. Des gens nés ici et dont les parents sont nés ici disent « respectez notre culture ». Ils ont raison : on doit respecter leur culture et les laisser pratiquer leurs cultes, leurs coutumes. Mais ça s’arrête là. La sphère publique, les écoles, les tribunaux, le parlement ainsi que tout autre service au public qui ne soit privé doit proscrire tout signe religieux ostentatoire en son sein. Quelle insulte à la démocratie, aux droits de l’homme et au respect des citoyens que cette prestation de serment dans l’hémicycle d’une fille voilée. Quelle honte.

Discriminations

Il est assez hallucinant que des communautés qui vivent dans un des pays les plus ouverts ne cessent de revendiquer des droits différenciés au prétexte que des discriminations existent. Il ne faut pas se voiler la face, si j’ose dire, il est plus facile de trouver un job quand on s’appelle Michel ou Frédéric que lorsque l’on s’appelle Saïd ou Mohamed. C’est clair et ce n’est pas normal, non. Mais l’être humain est ainsi fait. Argument qui, pourtant, ne tient curieusement pas la route lorsqu’on s’appelle Hitesh, Mizuko, Chang ou Shlomo. Pourquoi ? Délit de réputation ? Mais laquelle ? Pourquoi jamais un Chinois ne se plaint d’être discriminé ici ? N’y a-t-il pas une responsabilité partagée des communautés d’origines étrangères ?

Parce qu’au fond, en Belgique, c’est l’islam et ses préceptes, l’affirmation selon laquelle les lois religieuses sont au-dessus des libertés des autres qui effraient. Pas la couleur de la peau ou la consonance du prénom. C’est injuste pour les musulmans qui ne sont pas d’accord avec la suprématie de la religion. Mais c’est aussi de leur devoir de lutter contre ce phénomène aux côtés de tous les humanistes de la société. Ce sont les seules véritables victimes. Pas victimes des Belges mais des islamistes. Ceux-là restent discrets et se plaignent peu. Dommage.

Dans le cadre de la gestion des religions, un fléau a été induit par la peur de l’extrême droite : la discrimination positive.

Jamais une communauté dans ce pays ne s’est jamais autant plainte de discriminations. Pourtant, jamais une communauté n’a été si positivement discriminée. Dans les écoles, les administrations, les communes… tout est fait pour que le chantage de la sympathie envers l’extrême droite ne soit jamais brandi. La discrimination positive est et reste une discrimination. C’est une notion idiote, inepte et aux effets pervers qui mènera à une constatation irréversible : la discrimination positive, c’est quand ceux qui sont victimes de discriminations sont plus nombreux que les autres. C'est-à-dire, la majorité de la population qui n’est pas musulmane.

Légiférer rapidement

Il est plus que temps, pour le bien de tous ceux qui veulent pratiquer leur religion comme pour les autres, que nos élus débattent de la question et légifèrent. C’est trop facile et trop malsain de laisser les directeurs d’école décider du port du voile à l’école ou non. C’est hypocrite de se réfugier derrière la liberté de culte pour accepter que la personne fonctionnaire devant moi affiche son appartenance à une religion et me mettre ainsi en face d’une personne pour qui mes droits sont moins importants que sa foi.

Dans un texte précédent (Mahomet, Gaspar et les "têtes de merde"), j’avais déjà appelé à la raison et une réaction juste et proportionnée, non contre l’islam mais bien contre l’avènement de l’autoritarisme sous toutes ses formes au détriment des libertés de tous.

Une passivité de nos autorités conduira un jour à un énorme clash entre nos valeurs humanistes dans une société libérale au sens premier du terme et des valeurs restrictives irrationnelles et empreintes souvent de violence physique pour punir et venger d’autre part. 200 ans d’évolution sociétale pour œuvrer en faveur de la tolérance et la liberté individuelle, contre l’obscurantisme, risquent de voler en éclat et ainsi menacer la paix dans nos pays Européens.

Pour barrer la route à l’extrême droite, il ne faut pas tout permettre mais être au contraire intransigeant en ce qui concerne la représentativité de l’Etat et des lois.

Intégration ?

Les musulmans ne sont pas tous étrangers ou arabes, simplement. L’intégration est une question volontariste à double sens, comme doit l’être la mixité sociale. Ce n’est pas en changeant les principes de neutralité de l’Etat que l’on va aider des personnes à s’intégrer. Forcément, puisque les lois de leur religion leur semblent supérieures aux lois de notre pays… comment s’intégrer dans une société dont on ne veut pas ? Ces personnes sont des cas perdus. Ceux qui ne veulent pas jouir du droit de pratiquer leur religion dans le cadre selon lequel leurs lois religieuses doivent se soumettre aux lois belges ne peuvent être accueillis ici. Ca tombe sous le sens : comme je l’ai déjà écrit (Asile: une croix rouge pour une peur bleue), celui qui est admis sur notre territoire doit être traité comme un invité, pas comme un paria. Mais un invité ne peut se conduire comme un envahisseur. Ca tombe sous le sens aussi. Et la loi suprême, ici, ce n’est pas Dieu qui la dicte mais l’ensemble des Lois de ce Pays qui ont été édictées par les représentants du peuple.

Intégrer celui qui veut imposer les lois de son Pays dans celui qui l’accueille au détriment de la liberté de ceux qui y vivent, ça s’appelle de la collaboration. Ceux qui veulent aider l’islam à s’imposer dans la sphère publique sont des collabos. Rien de plus, rien de moins.

Il ne faut pas rejeter les personnes « suspectes » à cet égard. Mais on pourrait au moins leur faire déclarer par écrit qu’ils respectent les lois du Pays et pratiqueront leur culte dans les limites imposées par les différentes lois. En cas de non respect de cet engagement, la décision d’accueil pourrait être revue, par exemple. Parce que sortir d'une logique discriminative envers les musulmans passe par une acceptation des autres, il faut cesser d'accepter d'être qualifiés et traités comme des mécréants, des putes ou des "chiens infidèles".

Par contre, il serait une erreur d’exiger des étrangers de vivre comme nous. Non. Chacun, dans la sphère privée, doit pouvoir vivre comme il l’entend, pour autant que les lois soient respectées. Il n’est pas obligatoire de manger du porc, en Belgique, il n’est pas obligatoire de manger pendant le ramadan, il n’est pas interdit de prier, même 10 fois par jour, il n’est pas interdit de porter des vêtements exotiques… non, il ne s’agit pas de ça… si les étrangers veulent vivre différemment, il faut respecter le mode de vie qu’ils choisissent. Ainsi, ils comprendront que nous ne pourrons accepter que leur mode de vie nous soit imposé.

La nuance est importante. Il ne faut pas forcer d’autres à vivre selon une norme. Il faut les forcer à ce que ce qui n’est pas la norme pour les uns soit acceptable pour tous.

Ces remarques sont toujours soumises aux lois des Hommes, pas des Livres. En effet, battre sa femme reste un délit. Egorger des bêtes sans les étourdir reste un délit. Le mariage forcé reste un délit. Quoi que disent les livres, les lois des Hommes (avec un grand H) doivent être supérieures. Ainsi, la burqa et le niqab, par exemple, sont déjà interdits. En effet, la loi belge impose que toute personne soit reconnaissable sauf au Carnaval. Question de sécurité. N’est-il pas impoli de faire concurrence toute l’année à la communauté germanophone pour laquelle le Carnaval est si sacré? Je ne veux pas de sacs poubelles bleus mobiles sur les trottoirs de mon pays et expliquer à ma fille « quand tu seras grande, il faudra que tu te caches aussi car tu es une femme, un sous-être incapable de gérer sa sexualité » parce que des hommes auront imposé la loi de leur dieu, petit à petit.

Conclusion

En guise de conclusion, je dirais que la tolérance et la liberté sont des enjeux non négociables. Il n’est pas acceptable qu’une fille voilée serve dans les administrations, aussi compétente soit-elle, ni qu’un policier porte la kipa ou qu’un juge porte une croix par-dessus sa toge. Non. Et il est de la responsabilité des partis du parlement de couper l’herbe sous le pied de l’extrême droite en légiférant au plus vite pour éviter que les chemises noires ne soient remplacées par des foulards noirs. Il est grand temps d’arrêter la propagation d’idées politiques. Je dis bien politiques car les jeunes sont instrumentalisées par certains représentants religieux pour servir des intérêts autres que ceux liés à la foi.

Et maintenant qu’une partie de nos impôts servent à payer le culte islamique aussi, le nombre croissant des fidèles est une nécessité aussi importante que celle de séduire les électeurs au nom de la tolérance, celle qui permet de détruire la liberté des autres. Pour que des syndicats d’élus qui se disent progressistes acceptent au grand jour la soumission de la femme à l’homme au prétexte de la liberté d’expression et ainsi séduire les musulmans de deuxième et troisième génération qui ont aujourd’hui le droit de vote.

Il faut avoir le courage de dire STOP à la suprématie religieuse et avoir le courage de faire face au chantage de l’extrême droite en portant les libertés individuelles au-dessus de tout.

La Liberté de tous est plus importante que la foi de quelques uns.

Epilogue

Discussion avec un ami musulman à propos de tolérance :

- La légende dit que Godfroid de Bouillon, en 1075, s’est baigné dans la Semois et lorsqu’il en sorti, ses vêtements avaient disparu…

- Et alors ?

- J’ai toutes les raisons de penser qu’ils ont été volés par des musulmans

- Quoi ? Mais tu es fou ! Les musulmans n’existaient pas à cette époque !

Puisque nous sommes d’accord sur ce point, nous allons pouvoir discuter.


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